Comment es-tu tombé dans la marmite du rock ? Quels ont été les éléments qui t’ont influencé et attiré vers le rock ?

Max-well: « - En 2 mots ou en 2 livres ? Question de génération ! C'est assez simple, et puis il y aurait pu y avoir pire, comme le sport ! Je crois que c'est plus ce que cachait le rock, que la musique elle-même, quoi que ? Je lisais le chroniques de disques de Best et Rock & Folk pendant les cours de droit et de compta. Oui, j'aurais pu devenir... comptable! »

As-tu été musicien ?

Max-well: « - Impossible de dire "affirmatif" comme Serge, si j'omets la flute à bec (on est bien d'accord ?), j'ai testé la guitare, commandée à 15 ans dans un catalogue genre Manufrance, une folk avec cordes métal, et un songbook de Neil Young et des Doors, mais ca n'a pas dépassé "jeux interdit" et le riff de "Smoke on the water"... le tout sur une corde bien sur ! »

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EN Préambule, peux-tu nous donner ta définition du « fanzine » ?

Max-well: « - Fanatique magazine, si j'en crois mon dico ! »

Est-il bien vrai que « Le quatrième jour, Dieu créa le Légume du jour » ?

Max-well: « - Faudrait déjà croire ! »

Tu as été pendant des années le « grand chef » du fanzine nomme « Le légume du jour ». Peux tu nous le présenter en quelques chiffres ?

Max-well: « - Le grand mani'tout, oui : k7 tape recorder, blanco, cutter, rémington, papier brouillon, photos (avant de confier la mission à Franpou), collage, montage, diffusion, courrier, finances, abonnements...
Bref, presque tout, après quelques essais dans le journal de mon lycée, puis en découvrant le monde des fanzines, en faisant de la radio (1983/86), et via la presse rock.

J'ai d'abord participé à un zine qui s'appelait « Pantoufl'Rock » (1985/86), on est même allé au Havre participer à une sorte de rencontre, il y avait aussi des pochoiristes qui faisaient des trucs dans la rue auxquels j'ai participés.

Puis le type a décidé d'arrêter, j'ai repris l'affaire comme si j'avais besoin d'un truc déjà existant, mais j'ai tout fait à ma manière, on était fin 1986 et j'avais quand même 25 ans, 1 boulot, un enfant, ce qui explique peut-être pourquoi j'ai installé le truc, avec à la fois un peu de sérieux et beaucoup de travail.

J'avais rêvé d'être rock critic, mais j'étais trop nul en anglais (c'est ce que je pensais!).

J'ai publié 7 numéros en 5 ans, plus 2 ou 3 newsletters intermédiaires (N°0 à 5 + le hors série Thugs), les derniers n° comptaient près de 50 pages bourrées à craquer + un 45t LP (4 titres) avec un tirage de 1200 ex.

Je passais en gros 4 à 5 mois sur la réalisation d'un numéro, ensuite fallait distribuer, souffler un peu, puis c'était reparti pour un autre, avec des nuits blanches à la clef et un stock de Guronsan pour le bouclage final. »

Comment était il financé ?

Max-well: « - Le premier numéro n'avait du quasiment rien couter : 300 exemplaires photocopiés par tous les plans possibles (ma belle mère à son boulot, moi au mien, d'autres ailleurs...).
Avec le recette j'ai réinvesti et ainsi de suite avec à chaque fois un peu plus de moyens.

Quand j'ai arrêté (1991) j'ai remboursé les abonnés des titres pas parus et le solde de la caisse a servi à financer des déplacements pour la réalisation du livre en 1992. »

Quels étaient les autres membres de cette joyeuse équipe du LDJ ? Se sont-ils reconvertis eux aussi, depuis cette période, dans une activité de la mouvance musicale ?

Max-well: « - La principale collaboratrice était Isabelle "Shakin'Louie Louie", la fille des voisins de mes parents, mais qui avait fait ses armes avec le très précoce David Dufresne (Tant qu'il y aura du Rock, Combo...) qui avait commencé à Poitiers à l'age de 14 ans je crois.

Isa m'avait écouté à la radio dans ma première émission et c'est ensuite tout naturellement qu'elle a participé au projet.

Il y avait aussi quelques autres plumes régulières et irrégulières dont je n'ai plus le nom (les n° et maquettes ne sont pas stockés chez moi, je ne peux pas te les citer tous), mais j'utilisais aussi plusieurs pseudos afin de faire diversions.

Il y a eu aussi des dessinateurs, Denis Grrr qui avait fait scandale auprès des ligues de vertus anarcho-punk par exemple.

Une rubrique confiée à Ronan des Barrock qui rédigeait tout manuscrit (c'est ce qui me plaisait). Olivier et sa copine Isa, qui filaient des coups de main sur la distrib et autres trucs. Des participations occasionnelles, des photographes dont bien sur Franpou.

D'autres participaient à l'assemblage du n° qui se faisaient en tournant autour d'une grande table sur laquelle étaient disposés les paquets de chaque page !

Cela s'est fait souvent dans la MJC de Champs sur Marne, chez Capsul Rock, puisque j'ai intégré l'équipe de bénévole de cette structure qui organisait des concerts dès fin 87.

Isabelle a travaillé un temps chez l'éditeur de notre livre : Alternatives (période Syros) puis je sais qu'elle a continué dans l'édition, mais j'ai perdu le contact en quittant l'Ile de France en 97. »

ET LE FAN-CLUB ?

Max-well: « - Un fan club avec une correspondance délirante entre Jérome "kid Dup's" Dupin de Bourges et moi.

Il avait 15 ou 16 ans et s'était mis à délirer dans les lettres interminables avec des gadgets et des personnages (Zonzon l'élefant...).

Donc, je l'avais nommé responsable du fan club. Il nous hébergeait lors des festivals Off d'Emmetrop à Bourges et aussi Marsu. Ses parents voyaient alors défiler toute une raya pendant une semaine.

Il a, par la suite, animé une émission sur Radio Béton à Tours où il s'est installé, monté un groupe et fait le DJ's rock avec des caisses de 45t sauvages. »

Dans un édito du LDJ, tu mentionnes que « la somme de travail y est gargantuesque ». Penses-tu que c’est plus léger aujourd’hui pour maintennir un fanzine en activité ?

Max-well: « - C'était un truc de dingue, mais c'était en partie du à ma manière d'entreprendre les choses : être complet, vouloir tout faire, en mettre le maximum, ne rien négliger, soigner la maquette, avoir le soucis du détail, ne pas savoir m'arrêter... Bien évidement tous ceux qui ont fait des fanzines le savent, mais disons que je ne passais pas la moitié de mon temps à boire des bières!

Je n'ai absolument aucune idée du temps qu'il faut aujourd'hui et je ne lis quasiment plus de zines, mais je ne vois pas pourquoi ça aurait changé, à moins que ceux qui les fassent ne soient plus des... fanatiques ! »

De qui vient l’idée des gadgets offerts avec le LDJ ?

Max-well : « - Sans doute d'autres fanzines qui le faisaient déjà, de Pif gadget auquel j'avais été abonné, et aussi pour me distinguer des centaines de titres qui existaient déjà dans ces années-là.

Le titre était un clin d'oeil farfelu à l'Ecume des jours de Vian, et le Légume s'était comme "les nouvelles du jour", les gadgets ont d'ailleurs suivi la thématique : Carotte des Washington Dead Cats, Flageolet des Carayos, Maïs, Gingembre... jusqu'au 45 tours dont le nom du label était Fruit Again, clin d'oeil à une reprise d'Alex Chilton (R.I.P.) par les Coronados "Free again" ! Fruit et légume, on parlait pas encore du bio! »

Le Légume du Jour a édité des numéros spéciaux, dont un sur Les Thugs. Que représente encore aujourd’hui pour toi ce groupe en particulier ?

Max-well: « - J’ai le droit d'écorner le mythe? Les Thugs c'était énorme, surtout à cause du premier 45 tours, puis avec tous les disques qui sont sortis par la suite.

Une cohérence rare parmi les groupes français: son, image, concert, attitude, démarche, reconnaissance... Maximum respect !

Ceci dit, le fait de ne pas avoir été plus reconnu ici, comme ailleurs (et je le dis en sachant qu'ils sont un des rares groupes à avoir été reconnus ailleurs, mais pas tant que ça non plus !), car leur succès est resté une succès d'estime, limite l'impact, disons historique !

Ils nous ont fait découvrir Nirvana, en rapportant de chez Sub Pop, leur label américain, les premiers 45 tours.

On aurait aimé qu'ils soient des Nirvana français, qu'on en parle encore. Hélas, ils sont déja des oubliés de l'histoire (de France).

Bien sur ils ont inscrit à tout jamais Angers sur la carte. Frenetic dancing ! »

Si je te dis les mots « tronçonneuse » et « fanzine », ca t’évoque quoi ?

Max-well : « - Tu connais l'anecdote hein ?

En voyant les Thugs la première fois (aidé de l'image du recto de la pochette de "Frenetic dancing"), j'ai imaginé faire un numéro spécial sur eux avec les bords découpés à la tronçonneuse.

Je me suis testé sur un vieux catalogue de la Redoute et la tronçonneuse de mon père : bingo c'était faisable !

Restait à calibrer le numéro avec une marge assez grande pour y coller un coup de tronçonneuse sur les 3 bords : une image fidèle à leur musique sonique, mélodique et déchiquetée.

Un numéro dont je suis très fier. »

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Crois-tu que dans quelques années nos enfants découvriront la réelle richesse graphique des fanzines des années 80 ?

Max-well : « - Si un jour ils savent que ca a existé ?! M'enfin, soyons modestes, les fanzines rock et graphiques des années 70/90 n'ont fait qu'utiliser des formes graphiques empruntées aux Dadaïstes, Lettristes et aux divers courants du Pop Art des années 60, jusqu'à Bazooka, collectif de vrais artistes créatifs.

Je pense surtout que le rôle des fanzines a été de permettre à toute une génération de s'exprimer, d'auto-apprendre un certain nombre de choses, de mettre en pratique le do it yourself à la fois hérité du punk mais aussi du clash générationnel hippie des années 60 et d'être donc la préhistoire de la libre expression qui s'est répandu via l'internet (blogs, sites...) qui ressemble tout autant à un grand collage-recyclage-brassage d'images-graphisme faisant appel à tous les styles-icones-photos-graphisme ayant existé depuis le 19e-20e siècle.

Quand je me balade sur tous les sites musicaux (style My space, même si le cadre est rigide et la création limitée) je prends mon pied à voir ce recyclage permanent d'images et je remplis des dossiers entiers de Flyers ou d'images comme je le faisais avant en photocopiant tout un tas de revues, livres d'art ou de photos pour y puiser de la matière à mes maquettes.

Autant que de musique, nous sommes des dévoreurs d'images, n'est-ce pas ? »

L’informatique a t il (ou a-t-elle) remplacé « l’art du découpage-collage-machine à écrire » qui a fait les beaux jours des fanzines ? Penses tu qu’il soit plus facile de faire un fanzine avec un ordi ?

Max-well: « - Je crois avoir en parti répondu, mais bien sur, le contact avec la matière (pour moi) reste important, même si j'imagine que les graphistes prennent tout autant leur pied (ou leurs mains !) devant un écran aujourd'hui.

Les rockeurs l'on bien compris en intégrant des outils et de la matière numérique dans leurs groupes et les techno band en y intégrant du dérapage rock roll et de la perfo trash scènique. C'est idem pour le monde de l'image. »

Pour quel résultat ?

Max-well: « - Ne soyons pas passéistes, la vie est un éternel recommencement. »

Je m’étonne de voir des formations autour du « fanzine » dans des maisons pour jeunes et moins jeunes : pensent tu que ceux et celles qui ont des choses à dire ou écrire ne trouveront pas par eux-même leur style et leur moyen de s’exprimer comme nous l’avons fait toi et moi ?

Max-well: « - Les mots "fanzines" et autres terminologies rock n' roll nous ont échappés, on parle partout de webzine, de flyers, de newsletter... ces angliscismes sont pas passés dans le mainstream, normal donc que ce soit dans les MJC pour vieux jeunes.

Aux jeunes d'inventer de nouveaux codes et nouveaux outils. »

Quand je dis « SCENES DE ROCK EN France », je pense automatiquement au livre du même nom, véritable bible sur la scène rock indé de la fin des années 80 et début 90. Peux tu nous narrer rapidement son histoire et nous dire quelles étaient les ambitions de ce livre ?

Max-well: « - D'abord je crois qu'on a bien cogité le titre, fallait surtout éviter "rock français"!

L'idée partait juste du constat que le dernier bouquin sur le sujet datait de 1978, co-écrit par Julien Regoli et Christian Victor (que j'ai depuis rencontré et dont je m'occupe parfois des contrats pour des animations qu'il fait sur le rock ou le cinéma).

On rêvait de voir un livre sur le sujet, y' en avait pas, alors on l'a fait !

Rédiger un plan, mettre en forme les idées et démarcher les éditeurs. Puis quand on a eu un contrat, on s'est mis au boulot : compléter les photos manquantes (de la photothèque de Franpou) puis un gros travail de documentation à partir des fanzines et de la presse, et des press-book de groupes, puis par la rencontre avec pas mal de groupes lors de déplacement à travers l'hexagone en utilisant les contacts et les réseaux que je m'étaient faits avec le fanzine : Poitiers, Bordeaux, Périgueux, Toulouse, Montpellier, Clermont (chez Buck des Real Cool Killers, un docu vient juste de sortir), Rouen, Le Havre, Lyon, Chambery, Nice, Marseille... un périple incroyable et des rencontres fabuleuses. Ca reste un des meilleurs moment de ma vie : être sur la route comme les groupes ! »

Comprends-tu que pour moi, et pour tant d’autres, ce livre soit LE LIVRE de références sur ces années-là en France ?

Max-well: « - Oui j'espère bien, on s'est pas fait chier autant pour rien ! »

Tu te souviens à qui il est dédié ? Tu peux nous rappeller qui étaient ces personnes et leur importance dans le rock ?

Max-well: « - Durant ou avant la réalisation de ce livre plusieurs acteurs de la scène ont disparu. Il n'y avait pas à faire de hiérarchie dans ces disparitions, nous avons donc dédicacé le livre à Marc Police, Olivier (de MKB), Kim (des Fabulous Cadillac) et Helno.

Bien sur, la disparition de Marc Police, guitariste des Wampas sur les 3 premiers albums, a été la plus marquante. Il s'est suicidé, avec étalé autour de lui, les disques de ses idoles guitaristes de Surf rock (Dick Dale...). Sans le connaitre beaucoup, je l'avais rencontré plusieurs fois.

J'ai participé à un repas avec son frère par la suite. Marc était un guitariste important, il avait participé à plusieurs groupes : Jezebel rock, Les Pasadenas, un type fragile et obsédé par son jeu et son instrument...

Helno, c'était le gamin de Paris, la gouaille des Bérus, un ancien Lucrate Milk, et quand même le fondateur des Négresses Vertes, un groupe qui avait en un seul coup réussi tout ce que François Hadji Lazaro n'a jamais réussi à faire : passer de l'underground au populaire avec un succès énorme et une musique authentiquement fraiche, métissée, pleine de racines de la chanson réaliste mais avec tous les ingrédients de la France des années 80/90.

Une VF des Pogues, mais qui avait cartonné autant à Londres qu'à New York, et ca bien avant la french touch ! Autant dire si le garçon avait un avenir ! Mais là, c'est la dope qui l'a emporté, le Noël.

Une belle chanson de Manu Chao lui rend hommage "mon ami Helno" sur l'air d'au clair de la lune. »

Est-ce qu’il y a plus de suicides dans le rock que dans les autres courants musicaux ?

Max-well: « - Pas plus que dans le métro ! »

Quel est le bilan pour toi – autre que financier - de l’édition du livre SDReF ?

Max-well: « - Une énorme satisfaction. C'est con, mais sortir un livre ca donne à croire qu'on laisse une trace visible de son existence. Et puis je crois qu'à la lecture, ca reste plaisant, concis et informatif, et les photos, même si le format et la photogravure sont foireuses, sont superbes aussi, ca reste pour Franpou son heure de gloire également ! »

Est-il toujours disponible et si oui : où et à quel prix ?

Max-well: « - Hélas non, le tirage est épuisé depuis 5 ans, et impossible de le rééditer, les films ont été perdus chez l'imprimeur en Italie par l'éditeur qui n'a jamais songé à les faire revenir.

Si on scanne les pages, ca va être pourri, faudrait refaire une maquette. Peut être qu'un jour j'y consacrerais du temps pour rendre la chose a nouveau disponible, mais c'est bien aussi de se faire désirer dans cette société ou tout semble accessible à tout moment. »

Un second livre est-il envisagé ou envisageable ? Que faudrait-il ?

Max-well: « - Un gros chèque ! Pas pour le blé, mais pour prendre 1 ou 2 années de congés sabbatiques et pas faire ca en plus du boulot qui sert à remplir le frigo ! Mais faudrait pas attendre encore dix ans, j'ai pas envie de faire un truc nostalgique. »

SDReF, c’est aussi une association et une exposition. Pour quand une multinationnale du même nom ?

Max-well: « - Oui, on a fait dans les produits dérivés ! Et ceci très tôt car le livre est sorti en 1993, et en 1994 on a monté (toujours avec Franpou) une expo photos-textes présentant une trentaine d'artistes. L'expo s'est baladée partout, générant des revenus bien plus sympathiques que le livre et surtout permettant de se déplacer, de rencontrer des gens, de continuer à porter le livre et ça m'a permis de développer une action d'animation en racontant une histoire du rock en France.

En 2000 nous avons remis à jour l'expo (nouveaux textes, nouveaux artistes... jusqu'à Dionysos, Mickey 3D) en élargissant le spectre musical de la scène française de la manière où il avait évolué-explosé : reggae, ragga, electro, hip hop, world, chanson. Elle tourne toujours.

peux-tu nous présenter les activités de l’asso SDReF?

Max-well: « - C'est en 2004 seulement que l'association a été créée afin de formaliser des actions de formations et d'animations qui se multipliaient, toujours autour "des musiques rock" diront-nous, par moi-même et d'autres intervenants (universitaires, chroniqueurs musicaux...) que j'avais croisés sur cette nouvelle aventure qui se poursuit toujours d'ailleurs.

J'ai du faire plus d'une soixantaine de formations (public pro, scolaire...) et d'animations (grand public) ces dix dernières années, un peu partout en France : bibliothèques, Irma, réseau de salles de diffusions, écoles de musique, collèges, lycées... sur l'histoire du rock, du reggae, de la scène française, voir de la soul/funk, de l'electro...

Par ailleurs, les ambitions de l'asso allaient au delà de ça : mettre en place un véritable centre de documentation et de projets sur la scène rock en France en valorisant le patrimoine de ces musiques (affiches, vidéo, flyers, visuels, démos, presse musicale, objets cultes...) et en impulsant des projets éditoriaux (livres, compil, DVD...).

Bref, un boulot énorme pour lequel il faut lever des fonds (subventions), coopter des énergies, d'autres structures, rentrer dans des programmes (aide à la numérisation, partenariats...).

Bien sur, le tout était dans une optique de fonctionnement de type "la fanzinothèque" plutôt que la Cité de la Musique, mais quand même... D'ailleurs un oeil sur le site du Hall de la chanson donne une très bonne idée de ce que j'avais en tête, et pour dire, eux font bosser 5 ou 6 documentalistes de manière permanente, ca explique leur travail fouillé et précis sur tout plein de thématiques ou artistes (http://www.lehall.com/)

A la place... je me suis lancé dans un chantier de... construction de maison à partir de 2007. Depuis les activités de formations continuent selon la demande (sans promo), mais les autres ambitions de l'asso sont en sommeil. Ceci dit tout cela m'a permis de maitriser d'autres choses, et peut être de sortir un peu du monde de la musique (rock) dans lequel je m'étais un peu trop enfermé depuis bientot 30 ans. »

Si l’association SDReF avait des moyens financiers et temporels sans limite, quels projets y développerais-tu ?

Max-well: « - Ce dont je parlais avant, y bosser à temps plein et structurer cela en maison de projets / d'édition, une sorte de "Fanzinothèque" à ma manière, faisant la liaison entre le passé le présent et le futur.

L'histoire me passionne et on n'y fait pas assez référence pour ne pas répéter les mêmes erreurs ou comprendre l'actualité. C'est idem dans l'évolution des musiques. »

As-tu une définition passe-partout du courant musical nommé « rock » ?

Max-well: « - Musique née de la fascination des teenagers blancs américains et puritains pour la musique noire sauvage et débridée, avant de devenir la bande son de la révolution utopique des années 60. »

Le rock est-il vraiment né dans les années 50 ?

Max-well: « - Bien sur, mais ses racines remontent à la nuit des temps. »

Est-on encore dans la préhistoire du rock ? Comment vois-tu l’évolution du rock, vers où va t il ?

Max-well: « - No futur ! »

Le rock, d’une manière générale, localement ou mondialement, est-il en bonne santé ?

Max-well: « - Pas plus que le reste de la planète. »

Le mot « rock » est très souvent associé aux mots « sexe » et « drogue ». Est ce que ça fait partie de son histoire ?

Max-well: « - Affirmatif. En tant que musique de substitution aux rites initiatiques, c'est évident. »

Pour beaucoup de personnes, Johnny Halliday est Un vrai rockeur : même pour toi ?

Max-well: « - J'ai une préférence pour Eddy Mitchell quand même. »

Crois-tu que didier wampas durera aussi longtemps sur scène que Johnny ?

Max-well: « J'espère pour lui, il faudra bien quelqu'un pour vanter les mérites d'Optique 3000 ! »

Madonna et Mickael Jackson, pour ne citer qu’eux, sont très souvent « rangés » dans la catégorie « rock ». Etonnant non ?

Max-well: « - Disons que c'est de la "pop" et que la pop est une des composantes du rock, et comme en France on mélange les étiquettes sans rien y comprendre, on utilise parfois le mot "Rock" comme terme générique pour parler de la "Pop -music". »

PEUX TU NOUS DIRE CE QUE SIGNIFIE LE MOT «ROCK » DANS LE CONTEXTE DU REGGAE, COMME DANS L'EXPRESSION "ROOTS ROCK REGGAE" ?

Max-well: « Le mot rock dans la musique jamaïcaine (années 60 et pré-punk) a souvent le sens de "rocher" ou "pierre" et ne fait aucunement référence au rock'n roll. »

ET PLUS PRECISEMMENT, NE S’AGIT-IL PAS D'UN ROCHER REPONDANT AU DOUX NOM DE « JAMAIQUE » ?

Max-well: «Evidement, la roche est un élément essentiel, la Jamaïque c'est un peu comme la Corse, les maquisards de là-bas s'appelaient des Cimarons ou Marons, des esclaves enfuis partis reconstruire des villages à l'africaine dans les montagnes impénétrables. »

PUNKY REGGAE PARTY : CA T'EVOQUE QUOI EN TANT QU'HISTORIEN DE LA MUSIQUE ROCK ?

Max-well: "la prise de conscience de Marley que le punk était à l'image du reggae : une révolution dans le rock...et que les punk appréciaient pas mal le ska et le reggae aussi. »

En quoi le « rock steady » est-il « rock » ?

Max-well: « - Le rock steady n'est pas rock, c'est une période charnière entre le ska et le reggae (1966/68) où le rythme s'est ralenti, les harmonies vocales développées, la musique s'est dépouillée, les cuivres ont souvent disparu, la basse électrique a remplacé la contrebasse...

On peut trouver les raisons de ce terme dans l'excellent ouvrage de Lloyd Bradley "Bass culture" (édition Allia, 2005). »

La « culture rock » est-elle en danger ?

Max-well: « - On s'en tape, le rock était intéressant quand il était une "sous-culture" comme tous les courants artistiques avant qu'ils soient académisés ou vulgarisés.

Vive les Cramps ! »

Rock et subventions font-ils bon ménage ?

Max-well: « - Le débat est dépassé, l'Etat n'a plus d'argent pour la (ou les) culture, et puis McLaren a fait sa valise, la grande escroquerie du rock n' roll est définitivement terminée. »

Existe t il un rock des villes et un rock des campagnes et si oui quelles sont les différences profondes entre les deux ?

Max-well: « - Sans doute l'un est plus poseur (la vague des BB rockeurs portés par Rock & folk à Paris) et l'autre s'attache moins au look. Mais ça ne veut plus rien dire, tout semble accessible de partout, même ces repères-là sont brouillés.

Il peut y avoir du rock plouc de grandes villes, et du truc chiadé de campagne! »

Que pense-tu des concepts de « musiques amplifiées » et « musiques actuelles » ? Quelle sera la prochaine appelation pour parler des musiques d’aujourd’hui ? Pourquoi pas « musiques contemporaines » ?

Max-well: « - Ce sont des termes institutionnels ou de réseaux professionnels qui ont compris dans les années 90 qu'il fallait utiliser des appellations qui plaisent aux politiques, mais n'ont aucun sens esthétique.

Comme disait déja radio Nova à la fin des années 80 ou Manu Chao plus tard, c'est la Sono mondiale, le Grand mix, ca se percute dans tous les sens, c'est le grand recyclage permanent et le brassage intégral. »

Un évènement national des années 80-90 comme « les états généraux du rock » a-t-il permis au rock d’avoir une plus grande lisibilité auprès du grand public ou était-ce seulement le moyen de se retrouver entre rockeurs de tous poils ?

Max-well: « - L'intérêt, il me semble, était surtout de se retrouver.

Le grand public, il doit garder son cerveau disponible pour regarder TF1 et voter Sarkozy ou pire !»

Peux-tu nous donner une play-list d’artistes pour comprendre l’histoire du rock ?

Max-well: « - Elvis, Chuck Berry, Rolling Stones, Stooges, Clash, Nirvana, au plus court. »

Le rock n roll est-il la dernière aventure du monde civilisé comme disait Spi d’OTH ?

Max-well: « - Il l'était, sans aucun doute, au moment où Spi en parlait de cette façon. »

Le rock est-il devenu « folklorique » ?

Max-well: « - Disons que c'est un produit, comme un autre, qui vit sur son image d'Epinal. »

Comment se porte actuellement la presse rock officielle (celle qui se trouve en kiosque) en France ?

Max-well: « - I don't know ? Je continue de lire Rock & Folk, mais avec un peu moins de plaisir depuis 3 ans que je me suis mis à l'auto-construction écolo, ma bible étant devenue le catalogue de Brico Dépot ou les éditions Terre Vivante. »

Existe-t-il une littérature rock et si oui, quels en sont les auteurs ?

Max-well: « - Oui bien sur : de Charles Bukowsky à Virginie Despentes, tout ça est sacrément rock. »

Peux tu nous parler du travail de Thierry Saltet ?

Max-well: « - A peine ! Comme bien d'autres depuis, il s'est mis à écrire sur sa ville (Montpellier) et l'histoire de ses groupes, en auto-prod.

Je l'avais rencontré chez lui il y a moins de 10 ans : un pur rockeur avec les mêmes références que nous tous.

Il a remonté un groupe par la suite avec Thierry Tuborg, un autre gars de Bordeaux, lui qui a auto-publié également son histoire et des romans. »

Quelles sont les personnes qui ont fait le rock en France et dont il faut se souvenir ?

Max-well: « - Henry Cording, Ronnie Bird, Les Problèmes, Dashiel Hedayat, Yves Adrien, Patrick Eudeline, Alain Pacadis, Little Bob, OTH, LSD, Bérurier Noir, Les Thugs, Noir Désir, Mano Negra, Sloy, les Wampas et j'en passe... »

Rock ? Punk rock ? Punk ? ... C’est quoi les différences ?

Max-well: « - Le punk n'est que le retour à l'esprit basique du rock 'n roll initial. C'était juste une manière de repartir à zéro et de faire table rase des égarements qui arrivent toujours avec le temps.

Dire "punk rock" ça peut permettre de préciser qu'on parle bien de musique, car punk est un truc beaucoup plus large, une sorte de style de vie, c'est à la fois "faire le con" et dépasser les limites. Ca peut être aussi avoir une certaine classe comme Clash, Chester ou son modèle Vérole (le fondateur des Cadavres).

C'est tellement de choses à dire... Situationnisme, pop art, art punk, nihilisme... c'est à la fois Sid Vicious et Malcom McLaren, Docteur Jekyl et Mister Hyde!

Clap de fin. »



(Propos échangés entre DDD et MAX-WELL fin avril 2010)